Le wiki comme carnet de terrain (homologie 2004/2023)
(ancienne page “Pourquoi ce wiki?”)
Samedi 1er avril 2023
J’ai inauguré ce site début 2022, sans savoir exactement pourquoi (voir Résumé initial des trois sections).
En 2018, j’avais repris l’écriture sur mon enquête au Yémen (2003-2013).
En 2019, je m’étais investi avec les Gilets Jaunes et dans divers mouvement citoyens.
En 2020 pendant le confinement, j’avais écrit sur ma famille et sur la France.
En 2021, j’avais longuement travaillé un site web classique, pour une autoentreprise de médiation laïcité qui n’a jamais décollé.
J’avais besoin de faire des liens, d’écrire le « mode d’emploi » de ma pensée et de mes propositions : le logiciel dokuwiki est conçu exactement pour ça.
J’ai naturellement posé une première arborescence avec trois sections :
- Comprendre mon enquête au Yémen,
- Valoriser mes propositions,
- Explorer l’histoire du monde
(section pour mes découvertes d’anthropologue, depuis l’abandon de ma thèse et mon rapatriement sur Sète).
Je reprends ce wiki en 2023, après une tentative d’expatriation avortée à Jeddah, en Arabie Saoudite. Mon logement à Sète étant loué, j’écris maintenant depuis la région parisienne, dans la maison où j’ai grandi - et je vais avoir 43 ans. Cela va faire quinze ans que je n’ai pas été financé comme anthropologue, dix ans que je ne suis rattaché à aucune institution. Je suis un anthropologue OVNI, auquel on refuse perpétuellement l’atterrissage, parce qu’il semble incapable de s’inscrire nulle part et parce qu’il joue des tours à nos écrans radars. C’est précisément ce qui me rendrait utile, mais aucune institution française à ce jour ne semble l’avoir compris.
Les choses s’arrangeront-elles jamais avec ce wiki ? Dois-je vraiment m’obstiner dans cette écriture compulsive, obsessionnelle, et surtout publique ? Hier soir, j’ai finalement compris…
Voilà l'homologie* :
Cette situation renvoie directement aux premières années de mon enquête au Yémen, dans la période 2004-2007 : lorsque je suis revenu sur le carrefour de Hawdh al-Ashraf, après mon premier passage à l’écriture. La réussite de ma maîtrise justifiait mon retour, mon passeport et mon permis de recherche m’autorisaient à être là - mais sur le fond je n’avais ma place nulle part. Mon intégration était un échec, et c’est sur cet échec que j’ai construit mon enquête.
Jour après jour, à travers la tenue quotidienne de mon carnet de terrain, j’ai tenté de construire un dialogue entre trois milieux (voir l’index des personnes dans la section Comprendre) :
les citadins du quartier,
les commerçants du carrefour,
les journaliers ruraux
Trois milieux entre lesquels s’était joué l’échec de mon intégration, et que cet échec réconciliait quelque part. Il était plus facile de dialoguer par-delà l’échec de ma première enquête, par delà le démenti de nos attentes collectives - lié en fait à la déroute de l’État yéménite, annonçant l’effondrement à venir. Je ne m’en rendais pas compte à l’époque mais j’ai su m’envoler à temps, comme ces oiseaux qui perçoivent les premiers signes du tsunami. Depuis je hante mon propre pays, porteur de ce message.
Jour après jour sur ce wiki, je tente de construire un dialogue entre trois milieux :
la France d'Emmanuel Macron,
la France postcoloniale,
la France Gilet Jaune.
J’ausculte l’unité de notre époque, par delà l’antagonisme des visions proclamées, amplifiées par les « réseaux sociaux ». Je veux que ma société comprenne avant qu’il ne soit trop tard, qu’elle retrouve aussi le chemin du ciel. Et bien sûr je fais face au déni. L’échec de mon premier terrain ? Une histoire personnelle, liée aux circonstances de mon passage à l’écriture… La guerre au Yémen ? Une histoire entre Arabes… Ou entre Grandes Puissances, et qui doit susciter notre indignation - mais ni plus ni moins que la disparition des ours polaires. Ça nous concerne, mais il nous manque la structure qui relieGB.
Bien sûr je n’ai pas colorié par hasard : je pose ici une homologie*, une articulation qui m'est propre, que je serai sans doute amené à reprendre ces prochaines semaines. On peut déjà consulter mon code couleur. L'analogie journaliers / gilets jaunes est assez évidente (vert) ; le point crucial réside dans le caractère indigène du macronisme (rouge) face à l'intelligence postcoloniale (bleu), plutôt que l'inverse.
Quoi qu’il en soit, mon écriture s’inscrit dans cette temporalité de la recherche anthropologique : la tenue du carnet de terrain, cet objet éminemment public (une fois domestiquée la dimension intime), où toute écriture est datée, et chaque rature potentiellement signifiante - d’où le choix du wiki.
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