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Johan Van der Keuken

Le photographe et documentariste Johan Van der Keuken

Le 7 janvier 2001 disparaissait Johan van der Keuken , photographe et cinéaste expérimental, né en 1938 à Amsterdam. Formé à Paris (IDHEC) dans les années 1950, il chassait sur les terres du documentaire tout en prenant à contre-pieds ce genre, dont il dévoilait de manière systématique les artifices d’objectivité. Van der Keuken prônait plutôt un « cinéma du réel », lucide sur les dispositifs narratifs employés, par une présence assumée de l’auteur derrière la caméra. Cinéaste encore assez méconnu, mais élevé par la critique au rang de Chris Marker et de Jean-Luc Godard, il est célébré ces jours-ci par une rétrospective au Musée du Jeu de Paume à Paris : Le rythme des images, du 16 juin au 17 septembre 2023.

J’ai découvert Van der Keuken à l’âge de vingt ans, avec la sortie de Vacances prolongées en novembre 2000. J’étais alors étudiant en physique, photographe amateur depuis l’adolescence et arabisant depuis le début de mes études - mais pas vraiment porté vers les sciences humaines, dont j’avais goûté l’arbitraire dans le cadre scolaire, dont je craignais l’auto-complaisance subjective, et qui me semblaient irrémédiablement vouées à l’absence de scientificité.
Un an plus tard, j’avais acté ma reconversion vers l’anthropologie. Van der Keuken m’avait tracé un chemin face au réel, une manière de procéder avec les sciences humaines - aussi avec la gent féminine, indissociablement…

En redécouvrant ses textes aujourd’hui, j’y décèle une adéquation surprenante avec certaines obsessions de mon travail ces dernières années, à l’interface des sciences sociales et de la théologie - obsessions dont jusqu’à présent je n’ai pas vraiment réussi à assoir l’évidence auprès d’auteurs de sciences sociales classiques.
Car en théorie, les sciences sociales ne parlent que de ça : la réflexivité* - historiciser, sociologiser sans cesse son propre regard - et j’ai adopté moi aussi cette discipline. Mais dans les faits, peu de sociologues* portent leur regard comme il l’a fait. Derrière sa caméra, le cinéaste sait toujours qu’il peut se retrouver nu ; cela n’arrive jamais au sociologue, qui ne se départit jamais de sa propre pensée. Aucun sociologue n’a jamais voulu comprendre comment j’avais porté mon regard, d’un bout à l’autre de mon enquête au Hawdh al-Ashraf. De sorte que mon regard, de ce lieu, est resté prisonnier.

Bref, les films de Van der Keuken sont sans doute la meilleure introduction à ce que j'entends par « appareil sociologique », ainsi qu'à la manière dont, malgré le passage à l'écriture, j'ai continué de regarder mes interlocuteurs dans les yeux.

Dans Les vacances du cinéaste (1974) :
La photo est un souvenir :
je me souviens de ce que je vois maintenant…

JVDK & « l'appareil sociologique »
…Mais le film ne se rappelle de rien.
Le film se déroule toujours maintenant.

(Code couleur)

Faire la prière les yeux ouverts. Lors de ma conversion à l'islam, c’était la chose la plus étrange, la plus forte et contre-intuitive, venant de mon éducation dans une culture chrétienne.
Dans cet entretien de 1998 avec Thierry Nouel (35'), Johan Van der Keuken évoque la polarité apolinnienne / dionysiaque qui traverse son œuvre, puis développe sa « théologie du hasard » - qui ressemble décidément beaucoup à la mienne…

Un des passages-clés, de 8:30 à 9:33 :

« Oui, je crois pleinement au hasard, mais je ne pense pas que ce soit Dieu qui règle le hasard. Le hasard c’est le hasard, c’est des trucs qui échappent… Mais qui est ressenti par nous comme magique, là où hasard produit des coïncidences, des correspondances… »

Dès lors que je coiffe ma casquette d’ethnographe*, cette théologie est la mienne aussi : elle n’est pas tant plausible que nécessaire au travail en sciences sociales. Mais Van der Keuken ne s’arrête pas là :

« Mais peut-être on peut aussi dire [le hasard] c'est le moment de liberté - mais une liberté qu’on peut saisir dans une forme. Au contraste d’une liberté qui simplement passe dehors mais… on la voit pas ! Et peut-être la vraie liberté, c’est la liberté qu’on ne voit pas, hein? Qui nous échappe à tel point qu’on ne s’en aperçoit même pas, tu vois… »

En somme, le « hasard » de la liberté humaine ne s’oppose pas à la « vraie liberté » (omnipotence divine), qui relève d’un autre type logique*

Van der Keuken est-il le « metteur en scène » (mukhrij) auquel Ziad téléphonait, entre 2008 et 2010?
(Scène filmée le 17 novembre 2008, le seul jour où j'ai sorti la caméra).

fr/valoriser/scenographie/johan_van_der_keuken/accueil.1691396899.txt.gz · Dernière modification : 2023/08/07 10:28 de mansour

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