Outils pour utilisateurs

Outils du site


fr:valoriser:alternative_setoise

Retour sur l’Alternative Sétoise

À partir de juillet 2019, mon implication dans un nouveau mouvement citoyen à Sète, en vue des élections municipales prévues les 15 et 22 mars 2020 (en fait interrompues par le COVID).

Bilan de mars 2020

Mon psychodrame avec l'Alternative Sétoise (10-11 mars)
[Premier tour des municipales, le 15 mars, puis début du confinement]
Quel avenir pour l'Alternative Sétoise?
(page d’accueil, 17 mars)
« La candidate et le CRS. Covid-19 et l’avenir du “citoyennisme” » (17-18 mars)
« Dans la cale de l'Alternative Sétoise, ou le temps long du confinement » (19 mars)
« Entrisme et confinement » (21 mars)
« Les griffes des chatons » (22 mars)

Revisite en 2024

25 septembre 2024. « Chapeau pour la clairvoyance, qu’il y aurait un gouvernement de droite… », me félicitait ma grande sœur ce dimanche au téléphone. « Mais comment tu as su ? ». Aujourd'hui article du Midi Libre : Michel Barnier appelle Marine Le Pen pour la rassurer.
Ça m’a donné envie de replonger dans « Mon psychodrame avec l'Alternative Sétoise », un texte où je raconte cette brève expérience militante en 2020, dans la foulée de mon engagement avec les Gilets Jaunes - en fait un retour dans mon milieu d’origine, après une longue phase de « radicalisation » (liée à l’échec de ma thèse).

old.taez.fr_sites_2018-2020_images_alts-covid-tronque.jpg

Le texte est rédigé les 10 et 11 mars 2020, quatre jours avant le premier tour des municipales, dont je prédisais : « La sanction des urnes s’annonce cuisante ».
En fait notre mouvement est arrivé derrière le Maire sortant François Commeinhes (34,87%), mais premier de l’opposition avec 19,24% - l’ancien bastion communiste ayant encore de bons restes :
• devant le candidat socialiste Sébastien Denaja, alors député (17,66%) ;
• devant le RN (14,38%), qui avait placé là sa prise de guerre Sébastien Pacull, l’ancien chef des Républicains de l’Hérault, au grand désarroi des militants locaux (voir ce tract reçu dans ma boîte aux lettres, signé du « Comité de défense des Militants, Adhérents et Sympathisants FN/RN Sétois ») ;
• devant aussi un candidat dissident de la droite locale, Rudy Llanos (11,56%), un bon médecin plutôt sympathique, qui est sorti de cette affaire totalement dégouté.

Pour le second tour il y avait une fenêtre de tir, car Rudy Llanos proposait de s’allier à la gauche, à condition que le Socialiste prenne la tête de l’attelage. Malheureusement notre candidate Véronique Calueba, avec 1,57% d’avance, considérait qu’elle avait gagné les élections…
J’ai donc repris la plume (Quel avenir pour l'Alternative Sétoise?), en espérant que mon témoignage favoriserait une prise de recul. Hélas, les militants étaient plus préoccupés par l’épidémie de Covid, et tout à leurs délires sur le « Monde d’Après ». Pour le second tour du mois de juin, après avoir passé le confinement dans sa maison de campagne, la candidate communiste a considéré qu’elle ne pouvait décevoir ses électeurs. Il y a eu alliance avec Denaja mais sans Rudy Llanos, et l’ancien maire a été réélu (47,10% contre 41,10%) malgré la triangulaire avec le RN (11,80%) - avec seulement 52,86% de participation.

Et depuis? Aux législatives de 2022, la circonscription Sète-Agde a été gagnée par un jeune député RN, Aurélien Lopez-Liguori : issu de parents pieds-noirs mais qui a grandi à Aix-en-Provence (voir ici), formé à l’Université Catholique de Paris, passionné comme moi de randonnée (et de Rugby), il est parachuté à Sète en même temps que Sébastien Pacull (voir là), et entre à l’Assemblée Nationale à l’âge de 29 ans… En 2022, il était encore légèrement minoritaire sur la commune de Sète : 49,96 % contre 50,04 % pour notre ami Gabriel Blasco (appelé G. dans le texte ci-dessous), qui est à peine plus âgé. En 2024, le député RN est réélu dès le premier tour.

Voilà pourquoi dès l’annonce de la dissolution, j’ai prédit qu’on allait vers une cooptation Macron-RN1), et prédit qu’on aurait un gouvernement de droite, dès la prétendue victoire du « Nouveau Front Populaire » (voir mon Journal de dissolution). Et cette rentrée me donne raison.

…Il suffirait pourtant que les musulmans diplômés* de ce pays soient dans la bienveillance avec la Gauche - et plus généralement avec les sciences sociales - plutôt que dans la complaisance, sous couvert de radicalité « intersectionnelle »*. C’est d’ailleurs la position majoritaire chez les cheikhs sunnites : que les musulmans composent avec le système électoral sans y adhérer, sans y prêter foi (voir la page La sociologie est un monothéisme) - car la Gauche elle-même n’est pas capable de ce recul, anthropologiquement.
Je tente de donner l’exemple sur ce site, même si c’est parfois de manière maladroite. Ci-dessous la fin de mon psychodrame, correspondant au souvenir que je veux garder.

(…) Et je pense qu’en politique il existe un enseignement analogue, que connaissent les vieux militants des partis. On ne peut pas gagner les élections du premier coup. On ne peut pas se réveiller un matin, et inventer le projet miracle qui suscitera l’adhésion générale. Il faut faire des campagnes, subir des déconvenues, et se relever. Il faut que le réel résiste. Il faut qu’un collectif se constitue, avec ses propres règles tacites, ses règles éprouvées, qui ne peuvent pas être « débattues démocratiquement ». La déduction seule est vouée à l’échec, et l’induction ne peut suffire, fut-elle sincère : c’est toujours par abduction* que se rencontre le succès électoral. Il faut qu’un collectif plonge au plus profond de lui-même, et y trouve les ressources pour faire les bons choix. C’est ainsi qu’on prend le pouvoir en Occident, où s’est construit le système des partis. Cela est directement lié à l’influence des guerres de religions, à la manière dont les États européens ont reconstruit leur stabilité en entretenant une forme de chaos régulé - le fameux Léviathan de Thomas Hobbes… Depuis cinq siècles environ, la politique occidentale repose sur l’incitation à construire des mouvements sectaires, orientés vers la prise de pouvoir, et qui régénèrent périodiquement l’Église dominante. Ce sont des considérations anthropologiques qu’il vaut mieux avoir en tête, pour comprendre cette fameuse « crise des partis » que les médias nous rabâchent.

Dans cette aventure de l’Alternative Sétoise, je repense à certaines scènes où les certitudes partisanes refaisaient brièvement surface - bien que toujours refoulées officiellement : il s’agissait d’une liste « citoyenne »…

Je vois encore l’excitation électrique de Véronique, à l’AG du 29 août [2019] au Palace, pour laquelle le PCF avait mobilisé ses troupes. La première réunion de l’été où la Reine daigna paraître, et déclarer formellement sa candidature. Je me souviens de sa morgue lorsqu'elle ajouta, comme pour montrer ses muscles de militante : « Moi je ne suis pas du genre à faire campagne derrière un ordinateur… ». Et moi comme d’habitude au premier rang, qui notait tout… Tout l’été nous avions commencé à refaire le monde, et Véronique n’avait envoyé que ses lieutenants (O., G.…). En fait c’était douloureux pour elle, mais je n’étais pas capable de le comprendre à l’époque. Ce monde de la politique nous était totalement étranger - sauf pour R., qui par son travail avait évolué dans les milieux syndicaux, et de fait il fut l’un des artisans de cette rencontre… En fait nous leur faisions peur, notre génération de « jeunes » déjà quarantenaires - alors que nous ne demandions qu’à apprendre, que l’on veuille bien nous parler, réfléchir avec nous… Contrairement aux vieux militants du 51 (rue Pierre Sémart, plutôt venus d’EELV), nous ne nous sommes jamais formalisés des attitudes partisanes du PCF. Car au fond nous n’avons jamais connu que ça, ces institutions déjà verrouillées, avec aucune place à prendre, mais néanmoins avides de visiteurs « pour le plaisir des yeux », car doutant de plus en plus de leur raison d’être… Alors nous avons été les hôtes du PCF, et c’est nous finalement qui les avons apprivoisés.

Nous avons aussi adopté G., le jeune et fringuant directeur de campagne, imposé par Véronique au lendemain de son élection. Ancien combattant du collectif « Une marina pour qui pour quoi », censé représenter à lui seul la relève du Parti Communiste Sétois… Et le voilà donc dans la position du Papa, rythmant les réunions de coordination avec son excitation de cocker (exactement comme le papa dans les albums de Boule & Bill, coiffure comprise…). Il est épaulé par sa fidèle épouse L., jeune et brillante Maître de Conférence en « Démocratie » - mais pas sociologue pour un sou, en tous cas pas assez pour questionner l’efficacité réelle de ses « porteurs de paroles », ni pour voir où était le problème avec sa position de chercheuse, d’un point de vue éthique.

Véronique, G., L.. Voilà la « clique » à laquelle je faisais référence hier. Elle n’est pas bien méchante, plutôt pleine de bonne volonté. Elle a commis des bourdes phénoménales, avec le Midi Libre notamment. La directrice d’agence Mme Froelig les trouvait horripilants à souhait, et ça s’est senti dans la couverture du quotidien régional. Il n’empêche que sans cette clique, il n’y aurait simplement pas eu de campagne. Elle a été le moteur de l’Alternative Sétoise, le coeur battant, au sens le plus mécanique du terme : pousser dans un sens, puis dans l’autre, dans les veines puis dans les artères, avec la régularité d’un métronome. À l’évidence, ceux-là étaient portés par une foi d’un autre ordre : pas la foi d’une sincérité extravertie ou d’un absolu idéologique, une foi plutôt liée aux vertus de la régularité, de l’obéissance et de l’abnégation. Cela s’appelle la discipline de parti.

Et c’est à travers cette discipline que François [Liberti, l'ancien maire], effectivement, gardait un certain pouvoir sur le cours des évènements. De fait lors des votations citoyennes, c’est essentiellement lui qui déplaçait les électeurs. On ne peut pas dire pour autant que « l’arrière-garde » conservait le pouvoir. Pour Véronique et G., cette discipline était simplement liée à la conscience de travailler dans une filiation, d’être les heureux dépositaires d’un legs. J’ai fait du porte-à-porte avec Véronique : malgré vingt ans de vie politique, elle avait conscience de marcher dans les pas de François Liberti, presque à chaque instant. Par rapport à nous, cette conscience les plaçait dans une toute autre temporalité. G. nous disait souvent, au mois d’août, que c’était sa première campagne : il partait du principe qu’il y en aurait beaucoup d’autres, et c’était pour lui comme une évidence. Pour nous autres, cette campagne était la première et aussi la dernière déjà : dans six ans nous ne savions pas où nous serions, ni où en serait le monde, donc c’était cette fois ou jamais. G. ne voyait pas à quel point cette certitude, pour quelqu’un de sa génération (né je pense vers 1990), le plaçait en décalage total avec la réalité française, et d’emblée comme un « fils de », un héritier casé quelque part, avant d’avoir pu connaître le monde. Mais encore une fois, il en fallait un comme G., une bête de somme. N. par exemple, bien qu’il fut le petit-fils de son grand-père [François Liberti], n’aurait jamais pu jouer ce rôle. Avant de se réaliser comme colleur d’affiches et de faire d’autres rencontres, il avait souvent l’air de se demander ce qu’il foutait là… Pourtant après quelques mois, la mayonnaise avait pris :


De ces doutes, de ces tensions internes et des cheminements qu’elles ont permis, il n’est jamais rien apparu dans la communication externe de l’Alternative Sétoise. Une communication lisse, souvent même consensuelle, voire bien-pensante. Et pour tout dire une communication insuffisante, tant nous étions occupés à cadrer l’énergie interne. La liste de discussion débordait, de déclarations existentielles et de « Moi je… », mais tout cela était filtré d’une main de fer, au point qu’à l’extérieur il ne paraissait quasiment rien. Début septembre, j’avais proposé ce logo - je peux bien le ressortir aujourd’hui…:
old.taez.fr_sites_2018-2020_confinement_alts_images_jouteurs-globe.jpg
À mes yeux, l’image représentait parfaitement notre mouvement : l’espoir d’une nouvelle mixité sétoise, d’une vitalité démocratique renouvelée, née de l’alliance des contraires et du fair-play de la compétition sportive. Le logo a été jugé trop agressif, et conflictuel. Véronique avait terriblement peur que le bateau lui échappe. D'ailleurs c’était assez ingérable pour M., notre attaché de presse à l’époque, qui allait bientôt prendre ses distances. M. s’est concerté avec N., le graphiste, qui venait de débarquer. Finalement le logo a pris cette forme:



Dans ce logo, je me suis toujours identifié au cerf-volant. Ils ont lâché la ficelle dans la dernière ligne droite, sans se demander ce qu’il adviendrait de moi. J’ai tout de même reçu dans ma boite mail l’invitation au dernier meeting, avec toujours le même brin de folie du graphiste… De l’extérieur, j’ai du mal à croire que cet « Alter-meeting » puisse être en phase avec l’humeur des électeurs (voir la com’ de Pacull en comparaison…). Pour autant je connais leur sincérité. Ils y croient et c’est très bien, même si ça doit me rester étranger.

(texte rédigé les 10 et 11 mars 2020)


old.taez.fr_sites_2018-2020_confinement_alts_images_altermeeting.jpg Dernier meeting avant le premier tour (finalement annulé pour cause de Covid).


Quel avenir pour l'Alternative Sétoise?
(textes rédigés la semaine suivante).

Accueil valoriser  /  Retour
fr:valoriser:alternative_setoise

1)
Sur la cooptation Macron-RN, voir aussi le diagnostique de Jean-François Bayart, qui mobilise une notion de configuration* - mais en mode Pourquoi on ne nous écoute pas??
fr/valoriser/alternative_setoise.txt · Dernière modification : 2024/10/10 13:31 de mansour

Donate Powered by PHP Valid HTML5 Valid CSS Driven by DokuWiki