Raison graphique

La raison graphique est un concept introduit par l’anthropologue Jack Goody (1919-2015), afin de permettre un décentrement dans la compréhension de l’histoire humaine.

« Écrire ce n'est pas seulement enregistrer la parole, c'est aussi se donner le moyen d'en découper et d'en abstraire les éléments, de classer les mots en listes et combiner les listes en tableaux. N'y aurait-il pas une manière proprement graphique de raisonner, de connaître ? »

La notion recouvre peu ou prou le propos de ma section Explorer, sur le rôle de la raison logique* dans la genèse historique. À ceci près qu'elle s'inscrit dans un clivage interne à l'anthropologie* (primitivisme vs. antiprimitivisme), qui n'a pas à me concerner en tant que musulman* :

« Un savoir écrit des sociétés sans écriture, cela ne va pas de soi : (…) les ethnologues, pour connaître la pensée “sauvage”, commencent souvent par la domestiquer. »

Quatrième de couverture de La raison graphique.
Traduction française de l'ouvrage The domestication of the savage mind (1977).
(Le concept a été ajouté au titre, à dessein, par Alban Bensa).

Que des musulmans se positionnent comme victimes de la raison graphique à travers l'Histoire (mouvement « décolonial »*), au même titre que les juifs d'Europe ou les Amérindiens, cela relève d'une escroquerie intellectuelle grossière. La raison graphique est depuis l'origine constitutive des sciences islamiques*, qui ont toujours su faire bon usage de la domestication (contrairement à la révolution scientifique européenne*).
D'où ma démarche, pour résister à cette conjoncture intellectuelle qui est la notre, de mobiliser ostensiblement la raison graphique dans la section de méthodologie coranique*.

Raison graphique et mémorisation
Jack Goody sur le site de la revue “Sciences Humaines”
Alban Bensa
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