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fr:comprendre:textes:lettres:2004_09_01-ziad_et_moi

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 ====== Ziad et moi (1er septembre 2004) ====== ====== Ziad et moi (1er septembre 2004) ======
  
-//Texte en forme de mail collectif (non-envoyé), où je décris mes rapports avec Ziad, pendant mon second séjour à Taez.//+<WRAP justify> 
 +<WRAP alsqr> 
 +//Texte sur mes rapports avec [[fr:comprendre:personnes:ziad|Ziad]]au milieu de mon [[fr:comprendre:moments:#2004|second séjour]] à Taez.\\ 
 +Rédigé comme un mail collectif, mais finalement non-envoyé.\\ 
 +<wrap lo>{{fr:atelier:textes:partages:ziad_et_moi.doc|Ziad et moi.doc}} (dernière modification le 1 septembre 2004 à 19:55)</wrap>//
  
-**Ziad et moi.** +<WRAP rightalign lo> 
-1 septembre 2004 à 19:55+Voir aussi : [[fr:comprendre:textes:lettres:2004_08_31-moi_et_mon_rond-point|Moi et mon rond-point]]\\ 
 +mail collectif du 31 août 2004 (la veille)
  
-Dans mes mails collectifs, je suis souvent face à un choix : soit je vous dit « c’est super, j’ai plein de copains », soit je décris les choses de manière un peu plus problématique, et à ce moment mes sœurs déplorent que je me sente seul.+</WRAP> 
 +</WRAP>
  
-+ 
 +**Ziad et moi** 
 + 
 +Dans mes mails collectifs, je suis souvent face à un choix : soit je vous dit « c’est super, j’ai plein de copains », soit je décris les choses de manière un peu plus problématique, et à ce moment mes sœurs déplorent que je me sente seul.
  
 J’ai écrit ce mail, auquel je tiens, bien qu’il n’ai pas sa place dans une étude sociologique. Certaines des choses que je raconte ici sont relativement personnelles, soit qu’il s’agisse de Ziad, soit qu’il s’agisse de moi-même. Si je décortique cette relation devant vous, ne vous imaginez pas pour autant que ce que je raconte soit excessivement personnel. Une relation comme ça est tellement artificielle qu’elle ne peut qu’être le produit conscient d’une volonté commune. On ne peut donc vraiment pas considérer qu’elle livre des secrets de l’intimité de Ziad ou de la mienne.\\ J’ai écrit ce mail, auquel je tiens, bien qu’il n’ai pas sa place dans une étude sociologique. Certaines des choses que je raconte ici sont relativement personnelles, soit qu’il s’agisse de Ziad, soit qu’il s’agisse de moi-même. Si je décortique cette relation devant vous, ne vous imaginez pas pour autant que ce que je raconte soit excessivement personnel. Une relation comme ça est tellement artificielle qu’elle ne peut qu’être le produit conscient d’une volonté commune. On ne peut donc vraiment pas considérer qu’elle livre des secrets de l’intimité de Ziad ou de la mienne.\\
 Naturellement, tout ce que je raconte ici fait l’objet de discussions permanentes entre Ziad et moi, parfois aussi avec des amis de Ziad, vous ne recevez donc rien « en exclusivité ». Naturellement, tout ce que je raconte ici fait l’objet de discussions permanentes entre Ziad et moi, parfois aussi avec des amis de Ziad, vous ne recevez donc rien « en exclusivité ».
  
-+==== [L'asymétrie des rapports] ==== 
  
 Pour que vos compreniez, je brosse rapidement le portrait de Ziad.\\ Pour que vos compreniez, je brosse rapidement le portrait de Ziad.\\
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 Donc c’est assez délicat de parler de compréhension, ou alors en l’opposant à la complicité. Je comprends Ziad, mais je ne suis pas complice. Je ne partage pas ses engagements politiques, je ne partage pas ses principes, je ne partage pas son humour et sa sensibilité. Logiquement, nous avons des visions du monde radicalement différents. Néanmoins il existe une sorte de complicité d’ordre intellectuel, qui réside dans le fait que j’ai appréhendé sa vision du monde et que je lui en propose une modélisation objectivée. Donc c’est assez délicat de parler de compréhension, ou alors en l’opposant à la complicité. Je comprends Ziad, mais je ne suis pas complice. Je ne partage pas ses engagements politiques, je ne partage pas ses principes, je ne partage pas son humour et sa sensibilité. Logiquement, nous avons des visions du monde radicalement différents. Néanmoins il existe une sorte de complicité d’ordre intellectuel, qui réside dans le fait que j’ai appréhendé sa vision du monde et que je lui en propose une modélisation objectivée.
 En somme c’est un peu la condition d’existence de notre relation que de se jouer quasi-exclusivement sur son propre terrain. Ziad n’a pas les moyens de me comprendre. D’une certaine façon, je suis inatteignable, Ziad n’a aucun moyen d’influer sur le verdict de ma société à mon égard, le jugement de mes pairs, le seul qui m’importe profondément en définitive, alors que c’est précisément cela qui s’est passé l’année dernière : je l’ai déstabilisé en influant sans le vouloir sur son statut social. En somme c’est un peu la condition d’existence de notre relation que de se jouer quasi-exclusivement sur son propre terrain. Ziad n’a pas les moyens de me comprendre. D’une certaine façon, je suis inatteignable, Ziad n’a aucun moyen d’influer sur le verdict de ma société à mon égard, le jugement de mes pairs, le seul qui m’importe profondément en définitive, alors que c’est précisément cela qui s’est passé l’année dernière : je l’ai déstabilisé en influant sans le vouloir sur son statut social.
 +
 +{{anchor:ashti-flus}}
 +==== [Le malaise de Ziad] ====
  
 Depuis qu’on se connaît, Ziad passe périodiquement par des phases de malaise, il ne parle plus.\\ Depuis qu’on se connaît, Ziad passe périodiquement par des phases de malaise, il ne parle plus.\\
Ligne 40: Ligne 53:
 Au final ce qui lui fait s’accrocher à moi, c’est une sorte de fascination pour ma réflexion, pour une tête occidentale. Ziad reste avec moi par amour pour l’intelligence, pour le plaisir de réfléchir. Ziad a de grandes idées, un Za’im dans l’âme, un vrai Napoléon. Pour ma part, je sais bien à présent que je comprendrai plus la pensée yéménite en allant voir ailleurs : contrairement à lui, j’ai l’opportunité de multiplier les contacts, les points de vues convergents. Pourtant je continue à aller qater au moins une fois sur deux chez lui, même si c’est pour parler tout seul ou pour écouter une cassette que je connais par cœur. Moi aussi je suis sensible à la beauté de l’histoire. Au final ce qui lui fait s’accrocher à moi, c’est une sorte de fascination pour ma réflexion, pour une tête occidentale. Ziad reste avec moi par amour pour l’intelligence, pour le plaisir de réfléchir. Ziad a de grandes idées, un Za’im dans l’âme, un vrai Napoléon. Pour ma part, je sais bien à présent que je comprendrai plus la pensée yéménite en allant voir ailleurs : contrairement à lui, j’ai l’opportunité de multiplier les contacts, les points de vues convergents. Pourtant je continue à aller qater au moins une fois sur deux chez lui, même si c’est pour parler tout seul ou pour écouter une cassette que je connais par cœur. Moi aussi je suis sensible à la beauté de l’histoire.
  
-+==== [Témoigner du monde d'où je viens] ==== 
  
 Avec Ziad, j’essaie de remplir le vide, de lui donner d’autres indices plus significatifs.\\ Avec Ziad, j’essaie de remplir le vide, de lui donner d’autres indices plus significatifs.\\
-Par exemple j’ai amené avec moi des cassettes d’Ani Difranco et on les écoute dans le Mamlaka. Je lui traduis des morceaux et je lui dit que c’est le condensé de mon rapport à la vie, aux relations humaines, à la politique, etc, la meilleure expression que je connaisse de la sensibilité que j’ai héritée de mon milieu social.\\+Par exemple j’ai amené avec moi des cassettes d’[[fr:valoriser:scenographie:ani_difranco|Ani Difranco]] et on les écoute dans le Mamlaka[[fr:termes:mamlaka|°]] <wrap lo>[le Royaume = la pièce de Ziad]</wrap>. Je lui traduis des morceaux et je lui dit que c’est le condensé de mon rapport à la vie, aux relations humaines, à la politique, etc, la meilleure expression que je connaisse de la sensibilité que j’ai héritée de mon milieu social.\\
 Mais c’est pas évident et je me demande si ça sert à grand chose. La cassette s’appelle « I am not a pretty girl » ; « Pour sûr ! », il doit se dire, sans vraiment avoir une idée de ce que ça veut dire. Que je puisse simplement m’identifier à une fille est déjà insensé… Mais c’est pas évident et je me demande si ça sert à grand chose. La cassette s’appelle « I am not a pretty girl » ; « Pour sûr ! », il doit se dire, sans vraiment avoir une idée de ce que ça veut dire. Que je puisse simplement m’identifier à une fille est déjà insensé…
  
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fr/comprendre/textes/lettres/2004_09_01-ziad_et_moi.1653923398.txt.gz · Dernière modification : 2022/05/30 17:09 de mansour

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